25 novembre 2023 - 13 janvier 2024
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Paris
76 rue de Turenne
75003 Paris France

La galerie est heureuse de présenter pour la première fois à Paris une exposition personnelle de Shim Moon-Seup après sa présentation à Perrotin Hong Kong en 2022. L'exposition regroupe un ensemble de treize peintures, une sélection d’oeuvres sur papier et deux sculptures.

Vue de l'exposition de Shim Moon-Seup à la galerie Perrotin, Paris, 2023. Photo : Claire Dorn. Courtesy of the artist and Perrotin
Vue de l'exposition de Shim Moon-Seup à la galerie Perrotin, Paris, 2023. Photo : Claire Dorn. Courtesy of the artist and Perrotin
Vue de l'exposition de Shim Moon-Seup à la galerie Perrotin, Paris, 2023. Photo : Claire Dorn. Courtesy of the artist and Perrotin

La nature est trop puissante. On ne devrait pas la laisser s’exprimer sans modification. On doit intervenir sur elle et avec elle, mais en douceur. C’est le rôle du sculpteur.

— Shim Moon-Seup
Portrait de Shim Moon-Seup dans son studio. Courtesy Perrotin

Shim Moon-Seup naît en 1943 à Tongyeong, presqu’île entourée d’îles sur la côte sud de la péninsule coréenne. Malgré ses études à l’université de Séoul, dont il sort diplômé en 1965, ses multiples expositions internationales et, depuis 1992, le partage de son temps entre la région parisienne et sa ville natale, ce pionnier de la sculpture coréenne contemporaine reste jusqu’à aujourd’hui profondément marqué par l’environnement maritime dans lequel il a grandi et où a éclos sa vocation artistique. Cette proximité séminale avec des éléments naturels et la confrontation au mouvement cyclique des marées nourrissent toujours aujourd’hui son activité créatrice, que celle-ci donne naissance à des rondes-bosses, des installations ou des peintures. Il doit cependant ses premiers succès, à partir de 1969, à la présentation au sein de l’Exposition nationale (gukjeon), manifestation aussi incontournable que prescriptrice en Corée du Sud, de travaux réalisés au moyen de matériaux modernes, et donc explicitement antiacadémiques, tels que l’acier inoxydable ou l’acrylique. Ces productions qui tranchent avec les normes dominantes de la sculpture, les prix reçus au gukjeon ainsi que la participation à des collectifs tels que le Troisième groupe des arts plastiques (Je san johyeong hoe), qu’il co-fonde en 1969, et l’influente Association de l’avant-garde coréenne (Hanguk abang gareudeu hyeobhoe), qu’il intègre en 1970, lui permettent d’être rapidement identifié comme une personnalité majeure du monde de l’art coréen.

Très fortement marqué par l’influence de Lee Ufan (né en 1936), qui lui semble apporter structure et méthode à un monde artistique coréen dispersé et trop peu enclin à la réflexion théorique, Shim Moon-Seup développe, au début des années 1970, une pratique qui se rapproche très fortement du Mono-ha, mouvement d’avant-garde japonais dont Lee Ufan est un des principaux théoriciens. C’est grâce à ce nouveau type de productions que Shim Moon-Seup entame une brillante carrière internationale. Il expose notamment au Japon et participe à la Biennale de Paris en 1971, 1973 et 1975. Ses œuvres, qui portent alors le titre de Relation, sont réalisées au moyen de matériaux simples : papier, pierres, tubes de métal, fil de fer, acier, ciment, troncs d’arbre...

La disposition de plusieurs éléments les uns par rapport aux autres génère une nouvelle perception de l’espace et établit un dialogue entre les différentes matières et entre leur état brut ou transformé. En effet, Shim Moon-Seup ne se contente pas uniquement d’utiliser des objets préexistants, mais agit souvent sur ces derniers, imprimant par exemple sa marque par la déchirure du papier ou par le travail minimal du bois, souvent réduit à une simple poutre. Il met ainsi en place quelques-uns des principes, en partie dérivés du taoïsme et du bouddhisme seon (jap. zen), qui régissent ses créations jusqu’à aujourd’hui : la recherche d’un équilibre entre des éléments divers, le refus d’une sculpture comprise en premier lieu comme une recherche plastique et la volonté de laisser chaque matière s’exprimer.

Il élargit par la suite son vocabulaire tout en restant fidèle à ces fondements. À partir des années 1980, il emploie régulièrement l’argile grâce à laquelle il réalise des formes simples et géométriques, principalement des cubes et des plaques. Il teste l’élasticité de ce médium en imprimant à celles-ci des courbures et des pliures, parfois jusqu’à la cassure. Il souligne ainsi les propriétés du matériau tout en limitant l’intervention de l’artiste au minimum. Quelques œuvres créées en terre rappellent fortement par leur silhouette celles issues de la série Wood Deity. Cette dernière apparaît d’ailleurs comme un pendant des Thoughts on Clay. Elle est développée par Shim Moon-Seup en réaction au caractère éloquent de l’argile, qui semble ne laisser que peu de place au sculpteur. Au contraire, l’artiste peut laisser le bois s’exprimer librement tout en y imprimant de manière visible sa marque. Celle-ci consiste en un patient traitement des surfaces, d’ordinaire discrètement bosselées, ainsi qu’en l’assemblage de différentes formes hétéroclites. Ces rondes-bosses constituent les productions de Shim Moon-Seup qui correspondraient le mieux à une définition classique de la sculpture, si elles n’étaient pas la plupart du temps intégrées à des installations. De plus, leur présentation à même le sol, leur aspect à peine dégrossi et leur titre évoquent plus des idoles, réduites à leur plus simple expression, que des œuvres destinées à trôner dans des institutions culturelles. Shim Moon-Seup poursuit jusqu’à aujourd’hui ce questionnement sur la définition de la sculpture dans de multiples travaux associant, parfois au sein de dispositifs monumentaux, bois, pierre, eau, acier, aluminium, fibres optiques, polyuréthane ou coton.

Vue de l'exposition de Shim Moon-Seup à la galerie Perrotin, Paris, 2023. Photo : Claire Dorn. Courtesy of the artist and Perrotin

Outre la variété des matériaux employés, Shim Moon-Seup a diversifié ses recherches en donnant naissance à de nombreuses œuvres bidimensionnelles. Son premier fait d’armes marquant en ce domaine est la série Opening up, qu’il expose en 1975 à la biennale de Paris. Il introduit alors dans son travail la question du temps, par la génération de traces d’usure sur des toiles montées sur châssis et passées au papier de verre, tout en continuant à souligner les propriétés physiques des éléments employés. Ces travaux s’inscrivent dans une tendance suivie par de nombreux peintres d’avant-garde plus âgés, connus pour être devenus les principaux représentants du dansaekhwa, mouvement pictural dans lequel l’interaction de l’artiste avec l’œuvre ainsi que le procès créatif l’emportent en importance sur le résultat visuel obtenu. Shim Moon-Seup élargit également son éventail créatif de manière plus classique en réalisant des croquis et des photographies, parfois retouchées à l’encre. Toutefois, sa principale contribution au champ des arts graphiques est avant tout une abondante série de peintures sur toile, qu’il commence à produire en 2002, son atelier français étant trop petit pour se consacrer uniquement aux rondes-bosses et aux installations.

Shim Moon-Seup ne conçoit pas ces travaux à l’huile ou à l’acrylique comme fondamentalement différents de ses sculptures. L’alliance du grand format, dans lequel les spectateurs peuvent s’immerger, et de compositions simples basées sur des gestes renouvelés à l’identique suggère ainsi l’existence d’un espace qui s’étend au-delà des bords de la toile. Dans une conception héritée de la calligraphie, pratiquée dans sa jeunesse par Shim Moon-Seup, la trace visible du pinceau permet, quant à elle, d’exprimer l’individualité de l’artiste et de transmettre le souffle (cor. gi ; chin. qi) qui le parcourt, comme il parcourt toute chose dans une conception du monde extrême-orientale. Cette dimension cosmologique de la pratique picturale trouve également à se déployer dans la réitération des mouvements du peintre, qui évoque ainsi les cycles censés animer l’univers tout en s’y identifiant. L’inscription dans une culture traditionnelle est en outre explicitée par la monochromie affirmée des toiles et par la manière dont Shim Moon-Seup applique la peinture en couches allant du plus clair au plus foncé. Ce faisant, il retrouve en effet un rapport aux nuances chromatiques de l’encre et les procédés classiques de son application sur le papier. Enfin, l’aspect répétitif des gestes et systématique des compositions est une évocation des vagues qui ont si fortement marqué la sensibilité de l’artiste. Les dominantes bleues sont d’ailleurs pour lui une référence évidente à son passé et à la mer, qu’il porte en lui et qui lui a appris à regarder la nature autant qu’à collaborer avec elle.


Mael Bellec

Conservateur des arts chinois et coréens du musée Cernuschi

SHIM Moon-Seup

Né en 1943 à Tongyeong, Corée du Sud
Habite et travaille entre Tongyeong, Corée du Sud et Paris, France

Shim Moon-Seup (né en 1943), pionnier de la sculpture moderne en Corée, utilise la « nature » et la « temporalité » comme éléments centraux de ses œuvres, et poursuit une quête constante de la meilleure façon de percevoir et exprimer ses thèmes favoris grâce aux possibilités infinies qu’offre l’art, au-delà des genres et des médiums standardisés. Reconnu également au niveau international, il a reçu le titre français de Chevalier des Arts et des Lettres en 2007, ainsi que le Prix d’excellence de la 2nd Henry Moore Grand Prize Exhibition en 1981.


Il a présenté des expositions personnelles dans des lieux prestigieux tels que le Gyeongnam Art Museum de Corée (2023), le Yuan Art Museum de Beijing (2018), le musée national d’Art moderne et contemporain (MMCA) de Corée (2017), le Palais-Royal de Paris (2007), la Fondazione Mudima de Milan (2001) et la Tokyo Gallery (1999). Son travail a également été exposé dans le cadre d’expositions collectives lors de biennales internationales : « Tiger’s Tail : 15 Korean Contemporary Artists for Venice ‘95 » à la Biennale de Venise (1995), l’International Sculpture Symposium lors des premiers Jeux olympiques de Séoul au parc olympique des sculptures de Séoul (1987), la 13e Biennale de São Paulo (1975) et la Biennale de Paris (en 1971, 1973 et 1975). Ses travaux font aussi partie des collections de grandes institutions artistiques : le MMCA, le Seoul Museum of Art et le Leeum Museum of Art (Séoul) en Corée, le parc de sculptures de Hakone au Japon et le Fonds national d’art contemporain de Paris.


L’artiste a récemment participé à l’exposition collective « Only the Young : Experimental Art in Korea, 1960s-1970s », qui s’est tenue en 2023 au MMCA de Séoul. Elle a ensuite été transportée jusqu’au musée Solomon R. Guggenheim de New York, où elle restera visible jusqu’en janvier 2024.



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